Analyse de l’Esthétique de Hegel
L’esthétique d’Hegel est sans doute la philosophie de l’Art la plus connue mais aussi l’une des plus difficiles d’accès. Nous vous proposons donc une synthèse de son Esthétique (issu de cours donnés en 1818 et publié après sa mort).
Hegel est idéaliste, autrement dit il considère que tout ce qui existe est rationnel : « le réel est le rationnel et le rationnel est réel ». Ainsi, l’Histoire, comme l’Art, sont un seul et même processus par lequel l’Esprit ou la Conscience parvient à l’auto-réalisation. Ce processus historique se fait par étapes dialectiques. La première étape est une thèse ; puis vient la négation de la thèse (l’antithèse), avant que la synthèse vienne dépasser la contradiction en posant une nouvelle thèse. Au niveau le plus général, les étapes sont :
- Esprit en soi (la thèse)
- Esprit pour soi (l’antithèse),
- Esprit en soi et pour soi (la synthèse).
Hegel lira donc l’histoire de l’Art à l’aune de cette dialectique :
1) L’art exprime l’esprit de cultures particulières, ainsi que celle des artistes individuels et de l’esprit humain général.
2) L’art progresse à mesure que l’Esprit se réalise.
Hegel et l’esthétique de Kant
Quand il a commencé à développer sa philosophie de l’art, Hegel a été influencé par les idées de Kant, Schiller et Schelling : ces derniers pensaient que l’expression artistique comme une sorte de point culminant de l’histoire de l’esprit humain, et que l’art révèle la vérité dans une façon directe, intuitive. (Kant pense que l’impulsion esthétique crée une d’harmonie implicite entre l’homme et le règne des fins, sorte de paradis moral). Plus tard, Hegel, à partir de la Phénoménologie de l’Esprit, s’est éloigné de la position de Kant, et a jugé que les étapes culminantes de l’histoire humaine ont été purement rationnelles, et que l’intuition ne pouvait être le mode de compréhension premier de l’Art. Ainsi, on est bien loin de la théorie de Nietzsche sur l’art, qui le considère comme une pure émanation individuelle de la créativité.
Hegel et les trois étapes de l’Art
Les trois principales étapes de l’histoire de l’art reconnues par Hegel sont l’art symbolique, l’art classique et l’art romantique. Chacune d’elle est définie par sa relation à l’idée et à la forme.
Dans la première étape, l’art symbolique exprime une idée puissante dans une variété de formes qui sont ressenties comme n’étant pas vraiment adéquates à son expression. En conséquence, la forme est déformée dans la tentative de prendre en compte la puissance transcendante de l’idée. Hegel prend exemple sur l’art égyptien ancien, notamment les têtes d’animaux-dieux. D’autres exemples pourraient être convoqués : l’art africain premier met en scène la fertilité des dieux en montrant des organes sexuels exagérés.
La deuxième étape (art classique) est illustrée par la sculpture grecque classique. La forme humaine idéalisée et parfaite incarne l’idéal sans aucune distorsion. Mais alors que la perfection formelle est évidente, la profondeur de l’idée exprimée est limitée.
D’où la troisième étape, l’art romantique, qui souligne l’intériorité. Quand l’art romantique utilise des images, il insiste souvent sur l’insuffisance de l’image à réaliser l’idée. L’art chrétien appartient à l’art romantique selon Hegel, notamment via les crucifixions, les martyres et la représentation des souffrances du Christ.
Hegel et la hiérarchie des formes d’Art
Dans sa philosophie esthétique, Hegel a également organisé les arts de manière hiérarchique, de ceux qui sont les plus attachés à l’image, et donc plus adaptée à l’art symbolique (par exemple, l’architecture) à ceux plus tournés vers l’intériorité et l’auto-réalisation de l’esprit (par exemple, la poésie).
Selon Hegel, qui rappelons-le, a vécu sous la période romantique, l’art arrive à son terme. Le Romantisme permet à l’Esprit d’atteindre sa pleine réalisation. Cette thèse de la « fin de l’art » est aussi déroutante que sa thèse sur la fin de l’histoire. Cela ne signifie pas que l’Art va s’arrêter, mais qu’il ne saurait de nouveau se développer. Hegel n’envisage ni régression, ni nouveau progrès possibles après le Romantisme.
Votre résumé de l’esthétique ressemble plus à une analyse, quelque peu gratuite, de ces grands cours donnés par Hegel à Berlin.
Très utile et bien fait, mais les textes comportent quelques erreurs, comme par exemple : “Plus tard, Hegel, à partir de la Phénoménologie de l’Esprit, Hegel s’est éloigné de la position de Kant ” ^^ Juste besoin d’une petite relecture mais sinon, c’est très bien ! 😀
Merci Hippyangie, corrigé!