Introduction à la philosophie du droit

Introduction

Le droit, la morale, la religion et la justice peuvent avoir des définitions différentes mais ont pour point commun de regrouper des règles. Le mot droit est susceptible de plusieurs définitions. Il s’agirait de l’objet de la justice ; d’un point de vue formel, le droit est un ensemble de règles consacrées par l’autorité publique. Il est un instrument indispensable de la vie en société. Sans droit, il n’y a pas de civilisation conformément à un adage classique, Ubi societas, ibi us qui se traduit comme là où il y a la société, là se trouve le droit. L’étymologie du mot morale vient du latin moralis, traduction par Cicéron du grec ta ethica qui désigne comme ce qui a trait aux mœurs et de façon générale, aux règles de conduite .Pour le terme religion, l’étymologie est incertaine. Pour les uns, il fait référence aux verbes ligare ou religare qui signifie lier ou relier. Selon cette acception, la religion constituerait un lien entre les personnes et concernerait les relations entretenues avec une divinité. Pour les autres, la religion signifie revenir sur ce que l’on fait et renvoie donc aux scrupules, à la ferveur. Elle édicte des règles afin d’organiser les relations avec la divinité ainsi qu’avec les autres personnes. Quant à la justice, elle vient du latin justus qui exprime ce qui est droit et juste. Partant de ces préliminaires, il nous faut connaitre quels sont les caractères de la règles de droit ? Quels sont les caractères des règles de conduite ? Et quelle comparaison peut-on faire de la règle de droit avec celles de conduite ?Ainsi, notre travail s’articulera autour de trois points. Premièrement, nous verrons les caractères de la règle de droit (I).Deuxièmement, nous verrons les caractères des règles de conduite (II).Et troisièmement, nous ferons la comparaison de la règle de droit avec les règles de conduite (III).

I. Caractères de la règle de droit

De prime abord, nous avons intérêt à signaler que nous parlons de droit dans son sens objectif qui s’écrit en grand D et non le droit comme subjectif qui renvoie aux prérogatives. Le droit est un système de règles et de solutions organisant la société au nom de certaines valeurs sociales. Il vise à la justice sociale ou bien encore à la sécurité. C’est un phénomène normatif qui nécessite que l’on s’interroge sur la règle de droit et ses caractères. Cette interrogation permet de mieux comprendre la règle de droit et ses sens, d’en identifier les limites et d’en prévoir l’évolution. Toutefois, cette vision n’épuise pas l’intégralité du sujet que nous avons à examiner. En effet, il existe une multiplicité de phénomènes sociaux qui entrent dans le champ du droit. Certains sont liés à la famille, d’autres à l’entreprise ou bien encore aux activités économiques .Face à cette situation ,le droit doit identifier, classer, ranger, d’où une organisation du droit en branches et codes. Cette nécessité ne s’explique pas seulement par des raisons pédagogiques pour identifier les objets et sujets du droit ou une volonté de comprendre le réel ordonné par le droit, les enjeux sont aussi pratiques. Ils concernent la détermination du corps de règles applicables à des personnes mais aussi l’identification des juridictions compétentes.
Les manifestations du droit sont très nombreuses et variées. Se marier, passer un contrat, acheter ou vendre un appartement, voter, changer de nom, créer une société, exigent de mettre en œuvre des règles juridiques. Ces règles ont pour objectif de faciliter la vie en société et plus fondamentalement de l’organiser et de la réguler. Aucun corps social ne peut en effet subsister sans une certaine discipline de ses membres. Le droit détermine alors un ensemble de normes de conduite. Il détermine ce que chacun peut et doit faire pour que la vie en société soit possible. Cependant, les objectifs poursuivis par la règle de droit sont nombreux. Ils sont entre autres assurer la protection de la personne dans ses diverses activités, assurer la protection des biens privés de la personne et de ceux utilisés par tous, maintenir en l’état ce qui a été établi et éviter de perpétuelles remises en cause, doter la vie économique des règles qui vont en permettre le fonctionnement le plus harmonieux, doter la cité de règles pour assurer le gouvernement des hommes et fournir à la société des règles qui vont en faciliter le fonctionnement et lutter contre certaines dérives considérées comme socialement non désirables.
Par ailleurs, il nous faut retenir que la règle de droit présente plusieurs caractères. Elle est généralement abstraite et coercitive et elle a pour fonction de déterminer concrètement le comportement individuel. Elle ne vaut pas pour des cas particuliers mais bien au contraire, sa vocation est de s’appliquer à tous ceux qui se trouvent dans telle situation déterminée. Elle ne vise pas les personnes en elles-mêmes mais les situations juridiques dans lesquelles elles se trouvent. Par exemple l’article 1591 du code civil dispose que « le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties ».Ce texte concerne toutes les personnes liées par un contrat de vente. Le caractère général et abstrait ressort ici très clairement parce que la situation fréquente intéresse toute la population.
Le caractère coercitif de la règle de droit, quant à lui est connu par la pénalité en cas de l’inapplication de la loi. L’existence d’une sanction, prévue et appliquée par la société peut être considérée comme l’élément spécifique de la règle de droit. Certes, les autres règles de conduite sont également sanctionnées mais la sanction est d’une tout autre nature. Néanmoins, la sanction existe mais elle est interne .En droit tout autre est la sanction. En effet, celle-ci est extérieure à l’individu. Sa mise en œuvre exige que des poursuites judiciaires ou administratives soient déclenchées par des représentants de l’Etat ou des particuliers, victimes des agissements reprochés. Nul ne pouvant se faire justice à soi-même mais c’est par le biais de l’action en justice que la sanction de la règle de droit est donc mise en œuvre.

II. Caractères des règles de conduite

Comme la règle de droit, les règles de conduite telle la morale, la religion et la justice ont aussi leur particularité. Pour ce faire, nous allons les voir cas par cas pour mieux appréhender même si elles ont une familiarité. Parlant de la morale, nous avons affaire à un ensemble de doctrines, de règles de conduite, de relations sociales qu’une société se donne et qui varient selon la culture, les croyances, les conditions de vie et les besoins de la société. Dans un sens philosophique, la morale est une science qui cherche à répondre sous la seule autorité de la raison à la question des fins et de la destination de l’homme pour éclairer ses choix pratiques, surtout dans la distinction du bien et du mal dans ses actions. Elle caractérise non seulement l’ensemble de doctrines et de règles de conduite dans une société ou un groupe mais elle est parfois propre aux individus à travers des comportements spécifiques. La morale a une dimension introspective, en d’autres termes, elle fait l’objet d’une observation intérieure, observation par la conscience, examen fait par les sujets eux-mêmes des phénomènes psychologiques qui se passent en eux par rapport aux exigences des règles morales.
Quant à la religion, elle est un système de représentation du monde et des croyances fondé sur la foi et consolidé par l’accomplissement des rites dans le cadre d’un culte rendu à une ou plusieurs puissances souvent célestes .Il existe de multiples formes de religion, mais le fait religieux lui-même est universel et il n’existe pas une société où l’on ne puisse parler de la religion. Ses principaux caractères sont la foi, la croyance, la piété, la dévotion et bien d’autres. La religion elle aussi a des règles de conduite à observer, par exemple le décalogue ou les dix commandements donnés par Dieu à Moïse qui régissent les juifs et chrétiens dans leur relation avec Dieu et avec les autres hommes. La religion inspire la crainte vis-à-vis de la divinité en cas de transgression des lois divines. De cette manière, les remords et les regrets sont inévitables dans la religion. Il est à noter aussi qu’elle est une institution sociale parmi tant d’autres.
Cependant, la justice est vaste en fonction de ses diverses conceptions ou considérations .D’une part, elle est un sentiment de donner à chacun ce qu’il mérite de manière juste en respectant tous les droits d’autrui. Elle est l’action de reconnaitre quelqu’un à quelque chose, d’accueillir sa plainte ou encore l’action d’accorder à une personne ce qu’elle demande et qu’il est juste qu’elle obtienne. D’autre part, la justice est une institution ou un pouvoir qui permet de faire respecter les droits de chacun en punissant tout particulièrement ceux qui ont mal agi. Ainsi, elle est une norme de droit et d’équité .Ses caractères sont commutatif, distributif et correctif. La justice commutative qui concerne les transactions entre les individus et qui se conforme au principe d’égalité, la justice distributive qui applique le principe de proportionnalité dans la répartition des avantages et des honneurs en fonction des mérites de chacun et la justice corrective qui punit les infractions en appliquant également le principe de proportionnalité. Dans tous les cas, l’objet de la justice est toujours l’établissement d’un juste milieu reposant en dernière instance sur le principe de l’égalité.

III. Comparaison de la règle de droit avec les autres règles de conduite : La morale, la religion et la justice

Comparer la règle de droit avec d’autres règles de conduite, peut consister à chercher les différences ou les ressemblances qui peuvent exister entre elles dans leur manière d’application. Partant de ses caractères général, permanent et obligatoire, la règle de droit se démarque un peu des autres règles de conduite. Elle s’applique de façon générale c’est-à-dire que ses formulations de lois s’imposent à tous, de façon permanente puisqu’elle peut être limitée dans le temps mais elle est tenue à être observée tant qu’elle n’est pas abrogée et elle est obligatoire parce qu’elle est caractérisée par une prescription et une sanction, autrement dit, elle est catégorique et punit en cas de transgression.
Par contre, les autres règles de conduite comme la morale, la religion et la justice n’ont pas les mêmes caractères que la règle de droit. La différence essentielle qu’on peut évoquer entre la règle de droit et les autres règles de conduite sus-dénommées se situe au niveau de la pénalité. La morale, la religion et la justice ne comportent pas des principes de sanction mais elles ont une dimension d’intériorité même si la justice est d’une part liée au droit. Nous disons qu’elles ont une dimension d’intériorité parce qu’elles sont des règles de conduite liées à la conscience de chaque individu. En d’autres termes, ce sont des règles qui sont en sorte devenues des valeurs d’une société en gravant dans la conscience des individus les normes qu’il faut observer.
Pour ce faire, elles sont caractérisées par les remords et les regrets. Au lieu de sanctionner en cas de l’inapplication des normes et principes, elles créent des tensions d’auto-culpabilité chez les individus. De cette manière, on peut dire que leur sanction est intérieure et non extérieure comme pour la règle de droit. Par exemple, la morale prône le bien comme fin ultime afin d’assurer le bonheur des hommes mais quand un individu n’agit pas conformément à ses normes et commet le mal, cet acte lui sera reproché dans sa conscience sans l’intervention d’une autorité extérieure quelconque parce que l’individu incarne en lui les règles morales ; la religion de son côté pose ses principes et commandements mais en cas de violation, l’individu se culpabilise en craignant l’autorité divine. Il en va de même pour la justice, car quand on commet l’injustice, les remords et les regrets surviennent puisque la justice est aussi un sentiment.
Cependant, la règle de droit et les autres règles de conduite ont un point commun. Elles sont universelles puisqu’on peut les retrouver dans chaque société humaine sous différentes formes selon les milieux. Et leur but et objectif est de réglementer une vie ordonnée dans la société afin de garantir la dignité et les intérêts de chaque personne. En élaborant des lois, elles prônent le respect des valeurs humaines et l’harmonie sociale. On peut dire à cet effet qu’elles sont identiques en ce qui concerne leur finalité basée sur les rapports sociaux.

Conclusion

En définitive, la règle de droit et les autres règles de conduite sont complémentaires pour le bon fonctionnement d’un milieu social. Nous avons parlé de différence qui existe entre elles mais en réalité nous pouvons parler en termes de nuance parce que cette différence qui existe entre elles est minime. Le droit est comme un instrument indispensable de la vie en société, de même, les autres règles de conduite comme la morale, la religion et la justice sont des éléments non négligeables pour une vie en société. Mais nous pouvons noter que la règle de droit est la conséquence de l’activité de certaines autorités alors que les autres règles de conduite sont souvent issues d’une révélation divine ou spirituelle. Et en plus de tout cela, ces autres règles conduite précèdent la règle de droit, autrement dit, elles sont aussi sources du droit.

Par MBAILASSEM Désiré, étudiant en philosophie à l’Institut Supérieur de Philosophie de Saint-Laurent de Bouar

 

Documents et sites consultés

1-DCG1, Introduction au droit, Manuel 2018 /2019(PDF)
2-M .Mathurin GONIDANE, Cours d’introduction générale au droit à St Laurent, 2023/2024
3-L.Hansen-Love, La philosophie de A à Z, Paris, Hatier, 2022
4-https://www.studocu.com/row/document/universite-omar-bongo/droit-public/la-regle-de-droit-et-les-autres-regles-de-conduite-social/22092882
5-https://fr.m.wikipedia.org/wiki/R%C3%A8gle_de_droit
6-https://stmgag.wordpress.com /2021/11/11/regles-de-droit-et-regles-de-conduite

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