Le mimétisme, c’est vouloir ce que l’on ne voulait pas à priori, mais que la majorité ou un simple modèle mimétique veut, et donc, que nous voulons avec une volonté encore plus féroce que celle que l’on aurait si nous voulions vraiment, mais sans l’approbation de la majorité qui nous entoure, ou du modèle que l’on contemple.
Il est intéressant de préciser qu’une fois de plus, le mimétisme fait partie de ces sentiments qui sont gravés en nous, et cela au plus profond de notre être.
J’expliquerai en détail dans ce chapitre tout ce qui m’a amené à qualifier le mimétisme dans certains cas, « d’instinct mimétique ». Si l’on part du principe qu’un « instinct », représente « une tendance innée et considérable commune à tous les individus d’une même espèce », alors, je peux d’ores et déjà affirmer que l’action la plus universelle qui est une conclusion de « l’instinct mimétique », est la reproduction. Une femme brune qui est enceinte d’un homme aux cheveux noirs, donnera probablement naissance à un enfant brun, tout simplement parce que « l’instinct mimétique » des deux sujets a pour but de les emmener à élaborer une copie de ce qu’ils sont. Si leur enfant sera brun, ça n’est certainement pas parce que cela représente leur « désir », mais plutôt parce que c’est « la volonté de leur corps », donc un « vouloir » qui ne résulte pas de la « volonté de leur conscience », mais bien de leur « instinct », ici d’une part « sexuel », et pour le coté qui nous intéresse, « mimétique ».
En effet, dans la nature, les animaux miment ceux de leur espèce ainsi que leur milieu afin d’éviter de choquer, de surprendre, et donc de faire peur, et par conséquent, de se mettre en danger.
On remarque d’ailleurs que dans notre société, il est beaucoup plus aisé et beaucoup moins risqué de ne pas mimer de trop ceux qui nous entourent, lorsque l’on est déjà doté d’une certaine puissance, que celle-ci soit physique, mentale, ou financière.
Pour prendre un exemple, certes stigmatisant mais on ne peut plus précis, si le pauvre qui ne détient aucune marge de manœuvre financière afin de protéger sa survie, et parallèlement, que très peu d’énergie physique à déployer, n’accepte pas de se conformer au système dans lequel il est enfermé socialement, de la même façon qu’il est emprisonné dans sa condition d’humain, alors, il met son équilibre vital en péril. Il est donc forcé de mimer les autres, ainsi que les codes des différents microcosmes qui l’entourent, plus que ce que sa volonté le pousserait à faire s’il était plus puissant.
On peut d’ailleurs noter au passage que l’argent représente d’une certaine façon, une réserve d’énergie.
Le mimétisme présente de vertus pour l’humain, uniquement lorsqu’il se manifeste dans le but de s’imprégner de l’habitude d’autrui, et donc, sans avoir nécessairement recours au processus classique qui mène à l’habitude.
En effet, le fait de mimer un autre dans son comportement, son ressenti, ou sa façon d’être, permet à la conscience du sujet de prendre un rythme qu’il peut approuver avant même de l’avoir expérimenté. Dans cette situation, il n’a pas besoin de s’habituer pour comprendre ce qu’une attitude ou un comportement va lui apporter. Le simple fait d’observer l’autre, lui permet d’analyser et de concevoir toutes les phases de ce qu’il va tenter de mettre en place dans sa propre vie.
Le mimétisme permet parfois de s’approprier, une partie ou la totalité des conséquences positives d’un effort et d’une réflexion, qui ont été vécus par autrui. Cela confirme évidemment que le mimétisme est incontestablement, étroitement lié aux principes de base de la vie sur terre, qui doit toujours, et par tous les moyens qui sont à sa portée, se perfectionner en prenant en considération ce qu’elle a connu, ou ce qu’elle a pu observer sur ses semblables.
Chaque homme doit par conséquent être pleinement conscient qu’il est naturellement prédisposé pour être assujetti au mimétisme. S’il est bien souvent convaincu qu’il sera très complexe, voire même le plus souvent presque inenvisageable de tenter d’aller à l’encontre de son instinct mimétique lorsque ce dernier se traduit par un désir d’imiter un comportement naturel, l’humain doit savoir que sa conscience, en tant que « volonté de conscience », possède le pouvoir de se soumettre ou non au mimétisme d’un comportement d’« humain de société ».
Il me semble parfaitement cohérent de qualifier la tendance que l’humain présente à copier ses semblables « d’instinct mimétique ». Si l’on considère le mimétisme comme étant un simple désir de l’homme, une envie propre à un être, alors, il paraît évident qu’il ne s’applique pas à tous les humains. Or, il est incontestable que le mimétisme est une caractéristique qui est liée à la vie de tous, du moins à celle de tous les êtres qui vivent et qui sont capables de raisonner. Il est primordial de noter également que la raison se manifeste souvent chez l’homme comme une faculté qui magnifie les instincts, en corrigeant les éventuels désagréments et imperfections causés par ces derniers. Dans le cas où un instinct, qui est forcément une volonté du corps ou de l’esprit d’un homme dans sa condition « d’être à l’état pur », emmènerait cette personne à mettre en place des actions qui sont parfaitement inadéquates avec le quotidien de « l’homme en société » qu’elle est également, alors, c’est sa raison « d’homme en société » qui interviendrait pour contrarier le cheminement ainsi que les éventuelles conséquences de cet instinct.
Je tiens à préciser afin d’éclairer celui qui présente des difficultés à admettre que le mimétisme est un instinct, que cela n’est pas le fait qu’il ne s’exerce pas obligatoirement à tous les âges de la vie, ainsi que dans toutes les situations d’une vie, qui justifie qu’on lui retire sa qualité d’instinct. En effet, l’instinct sexuel qui peut décroitre, voire même totalement disparaitre, du moins de façon apparente chez un sujet pathologique ou très âgé, n’est pas moins « instinct » que la faim, qui elle, est à classer parmi les instincts relativement nécessaires à la survie d’un homme. Il en est de même pour ce qui est de « l’instinct mimétique ». Il est lui, un instinct qui est plus que les autres, entravé par la raison de l’homme. On remarque d’ailleurs que les enfants, qui sont des êtres chez qui de nombreux sentiments comme la honte, la pudeur, la culpabilité, ou la stratégie sont moins développés que chez les adultes, montreront un instinct mimétique plus flagrant que leurs ainés. Les adultes, et ce en grande partie à cause des sentiments précédemment cités, ont plus de mal à reconnaître qu’ils sont des êtres soumis à « l’instinct mimétique ». Ils ont l’impression de dévaloriser leurs actions au regard d’autrui, s’ils assument qu’ils les mènent plus par rapport au désir et à la représentation qu’ils se font du plaisir ressenti par un autre, que par rapport à leurs propres exigences et satisfactions, qui elles, prennent naissance directement au plus profond de ce qu’ils sont.
L’instinct mimétique est présent non seulement dans l’intégralité des échanges que l’humain aura au cours de sa vie avec d’autres humains, mais il se manifestera également lorsque le sujet est seul. En effet, l’humain doté de l’esprit le plus hétérodoxe qui puisse exister sur cette terre en ce vingt et unième siècle, se soumettra malgré lui à sa pulsion mimétique, même lorsqu’il se retrouve seul face à lui-même. À l’abri du regard de qui que ce soit, il copiera ses semblables dans sa façon de se mouvoir, de manger, et même de penser. Pourtant, le sujet que nous prenons pour exemple représente une personne dont la « volonté de la conscience » est habituellement peu inféodée au conformisme. Seulement, le mimétisme n’étant pas un désir, mais un instinct, il exercera sur le sujet une pression qui viendra contrarier les objectifs réels que la volonté de sa conscience peut avoir l’ambition de convoiter.
L’instinct mimétique fait naturellement partie de la volonté du corps de l’humain et pas de la volonté de la conscience de celui-ci. Lorsque le mimétisme intervient dans des envies relativement spirituelles, que l’on oppose à des désirs emmenés majoritairement par le physique, alors dans ce cas-là, il représente un « désir mimétique ». On notera bien sûr, dans la plupart des cas, que ces désirs mimétiques de l’esprit prennent malgré tout naissance dans l’instinct mimétique qui appartient au corps, et se transforment au cours de leur formation.
Tom Benoit, philosophe à Marseille, extrait d’ « Instinct mimétique et solitude asservie »,