Par RASAMOEL Paul Fried de Valois[1]
Schopenhauer est classé habituellement parmi les penseurs pessimistes. Il affirme que le monde n’est que souffrance et douleur et que le plus grand malheur de l’homme est sa naissance. Pourtant, l’observation de la réalité telle qu’elle est dans son aspect négatif ne veut pas dire que l’observateur est forcément pessimiste.
Notre réflexion ne cherche pas à discuter si Schopenhauer est pessimiste ou ne l’est pas, mais à comprendre la raison de son pessimisme. Se pose alors la question de savoir pourquoi Schopenhauer interprète le monde dans son aspect négatif ? Son pessimisme a-t-il une issue favorable qui donne à la réalité une vision rassurante ? Autrement dit, peut-on se servir de son pessimisme pour quelque chose de positif ? Pour répondre à ces questions et appréhender notre analyse, il convient de comprendre le pessimisme de Schopenhauer avant d’en dégager l’intérêt philosophique.
Schopenhauer et son pessimisme
Schopenhauer est un philosophe qui subsume le pessimisme et a marqué son histoire dans son concept fondateur, le vouloir se manifestant dans tous les phénomènes de la nature. Tous les êtres, vivants ou inertes, sont condamnés sans exception à conserver leur existence par une tendance aveugle nommée Volonté[2]. Cette condamnation de l’homme au désir implique sa condamnation à la souffrance. Elle se comprend par le monde qui se révèle de deux manières, l’une comme représentation et l’autre comme Volonté, comme l’indique l’intitulé de son ouvrage Le Monde comme Volonté et comme Représentation.
1.1. Volonté et représentation
Le monde comme représentation s’explique par le monde vu par l’intellect, la manière dont le sujet voit le monde. L’intelligence présente le monde à travers les intérêts particuliers des individus. Subordonnée à la Volonté conçue comme un moteur qui nous pousse à vouloir la vie, la vision intellectuelle demeure une illusion. Le sujet perçoit le monde à travers un voile, les ombres mouvantes animées par une autre substance, la chose en soi que Schopenhauer considère comme vouloir-vivre. La volonté de vivre en tant qu’essence intime de l’existence nous aide à mieux connaître la réalité du monde par la prise en compte de la totalité de l’expérience interne en ce sens qu’elle s’exerce au niveau de l’intuition.
Schopenhauer reprend à sa façon la distinction kantienne entre le phénomène et la chose en soi. Le phénomène, qui appartient au monde comme représentation, est constitué de l’objet distinct de nous en tant que sujets, à travers le prisme de l’intelligence. Il est régi d’abord par le principe d’individuation : les êtres sont distincts les uns les autres dans l’espace et le temps et liés par des relations de cause à effet, et puis par le principe de raison : rien n’est sans raison et tout devient, et enfin par le principe de la motivation : les individus agissent et veulent vivre. Ces catégories ne sont qu’un voile et non les choses en soi, car la représentation n’est qu’une apparence. Au-delà de ces catégories perçues par l’intellect, au-delà des rapports que nous établissons entre les choses, le monde existe en soi. A la différence de Kant, Schopenhauer soutient que nous avons accès à ce monde en soi. Nous le saisissons tel que nous l’avons en nous-mêmes par l’intuition immédiate, là où nous ne faisons qu’un avec lui.
L’unité de sujet et de Volonté trouve son explication dans la partie matérielle de notre être. Nous avons un corps qui n’est pas un phénomène parmi tant d’autres, étant donné que nous en avons une expérience interne : « Le corps est une première manifestation de la Volonté »[3]. Grâce à ce corps, la Volonté pénètre dans l’organisme vivant à travers les organes et le pousse à agir à sa guise en vue de la conservation individuelle ou physique (la faim), et métaphysique, c’est-à-dire la conservation de l’espèce (la procréation). Contrairement à l’altruisme qui est plutôt secondaire, l’égoïsme se manifeste directement et occupe la première position dans l’ordre de l’existence. Il relève des caractères naturels et apparaît à tous les individus. Chacun ne peut et ne veut qu’affirmer la Volonté comme seul moyen de maintenir la vie. La Volonté se révèle avant tout dans l’épreuve que nous faisons de nous-mêmes. Elle nous condamne à désirer la vie et motive inconsciemment nos représentations. Pour satisfaire l’objet du désir, la souffrance est inévitable. Vouloir-vivre est essentiellement vouloir-souffrir. La souffrance apparaît dans la quête du désir, et dès que celui-ci est satisfait, l’ennui survient. C’est pourquoi Schopenhauer écrit : « La vie oscille, comme une pendule de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui »[4]. La vie va de la souffrance à l’ennui et inversement. Voilà la condition principale de notre existence. En effet, rien de ce que nous voyons en l’homme n’est comparable à ce que nous voyons dans la nature.
1.2. Le vouloir-vivre et le malheur de l’homme
Le vouloir schopenhauerien est une poursuite sans but et sans limite. Il est commun à l’homme et à l’animal. C’est une force aveugle qui anime les individus et est présente également dans le règne végétal. Sous la forme la plus élémentaire, on la retrouve même dans la pesanteur et dans les autres forces d’attraction qui expliquent le mouvement des êtres inertes. C’est pourquoi Schopenhauer considère la Volonté comme « âme du monde »[5].
Dans son souci de tout expliquer par un principe unique, Schopenhauer manifeste l’obsession de parvenir à une philosophie totale qui couvrira tous les champs de la philosophie. Le vouloir est une force qui ne veut que vouloir. C’est l’essence de chaque chose, une substance dépourvue de sens. Aveugle, il est privé de conscience. Il fait de l’homme et également de tous les autres individus un être qui éprouve un sentiment de plaisir ou de bonheur qui est toujours de courte durée. L’homme est incapable de satisfaire pleinement ses besoins. Devant cette impuissance constitutive de la nature qui fait de cette existence une existence malheureuse, Schopenhauer n’accuse pas le destin et encore moins les dieux. En réalité, dans sa quête toujours insatisfaite, l’homme ne pourra échapper à la souffrance qui est la loi de toute existence :
« la volonté, dans cet état d’exaspération, est par nature une source intarissable de souffrance »[6].
La souffrance est polymorphe ; elle peut être physique, morale ou affective. Les premiers cris du nouveau-né sont déjà une forme de souffrance. La vie de l’homme apparaît comme une marche douloureuse vers la mort inéluctable qui le guette à chaque instant, une pathographie : « Toute biographie est une pathographie »[7].
C’est ainsi que Schopenhauer est qualifié de philosophe pessimiste. Il aborde une philosophie du malheur, une philosophie qui souligne la dimension tragique de l’homme. Nous sommes toujours en concurrence sinon en conflit avec l’autre, bien que notre existence soit une lutte pour la vie. La cohabitation avec nos semblables n’est autre qu’une inspiration égoïste, une fuite de la solitude. Nous cherchons les autres pour nous distraire du malheur de notre existence. L’homme sombre dans l’ennui, dont le poids est écrasant. Il cherche la société pour fuir l’ennui qui se saisit à nouveau de lui quand vient la déception. On n’échappe pas au malheur de la condition humaine. Les pauvres sont affamés, les classes supérieures s’ennuient. Etant universel, le malheur est la seule égalité que Schopenhauer reconnaît à tous les hommes. Devant cette calamité, recourir au suicide ne tue pas la vie, il tue la mort, car
« le suicide nie l’individu et non l’espèce »[8].
Le suicide supprime l’individu et non pas la souffrance telle qu’elle se manifeste collectivement. Un suicidaire est donc un lâche qui cherche le bonheur dans la mort et abandonne les autres dans la peine.
L’intérêt philosophique du pessimisme
Tombé au plus profond du pessimisme, Schopenhauer nous fait comprendre avant tout qu’on ne peut pas nier l’existence de la souffrance dans ce monde. Ensuite, cette compréhension nous permet de réduire nos désirs car, comme nous l’avons expliqué, ceux-ci sont responsables de la souffrance. Pour ce faire, Schopenhauer nous propose des solutions qui nous permettent d’oublier le vouloir-vivre, de sortir de l’égoïsme et de combattre le malheur universel. Ainsi, le pessimisme nous délivre de l’existence douloureuse pour nous mener à une existence heureuse par des étapes qui consistent à dire « non » au vouloir-vivre : la connaissance esthétique, la morale et le salut par la gnose.
2.1. La contemplation esthétique et la morale
La contemplation esthétique qui est offerte à tous nous aide à nous détourner pour quelques temps de la vie souffrante : « Combien la nature a le sens du beau ! »[9]. On ne peut qu’être optimiste en contemplant la beauté de la nature ou quelqu’autre œuvre artistique. C’est dans le vouloir-vivre lui-même qu’il faut chercher pour sortir du vouloir-vivre. La théorie de l’art est une théorie de la contemplation du beau et de la connaissance par les Idées en tant que formes sous lesquelles se diversifie et s’objective la Volonté. Les Idées correspondent métaphysiquement à la manifestation de la Volonté à travers les comportements de toute espèce vivante et également toutes les lois naturelles. Une construction architecturale obéit aux lois de la physique. L’œuvre de la nature et celle de l’homme nous donnent un spectacle sublime qui suspend les activités de la Volonté. Certaines œuvres comme la poésie demandent un développement exceptionnel de l’intellect.
La morale, quant à elle, nous aide à nous détacher constamment du principe d’individuation qui fait de nous des êtres égoïstes, victimes de l’illusion, du voile de Maya, afin de remédier au conflit du vouloir-vivre. Nous sommes les premières victimes de notre égoïsme qui est non seulement une faute morale mais aussi une folie. Il faut que chacun apprenne à considérer la souffrance de l’autre comme étant la sienne. La morale de Schopenhauer demande à l’homme de se délivrer de sa misanthropie pour adopter la philanthropie. Loin de s’appuyer sur des impératifs abstraits tels que la loi ou l’obligation comme le pense Kant, elle obéit avant tout à l’ordre des sentiments, à savoir la sympathie, la compassion et la pitié. Il ne s’agit pas d’une morale fondée sur la raison. Elle consiste à faire la morale aux gens[10] ; elle ne donne pas de motifs. Ceux-ci peuvent faire en sorte que la morale se serve de l’égoïsme. La vertu résulte assurément de la connaissance, mais il ne s’agit pas de la connaissance abstraite :
« Elle nait de l’intuition de l’identité du vouloir-vivre en moi et en autrui »[11].
Ce qui nous inspire de faire des bonnes actions, des actes de douceur, c’est la connaissance intuitive, la connaissance de la souffrance d’autrui dans le réel. Nous la devinons d’après les nôtres, et nous l’identifions à celles-ci.
Ce n’est pas dans la tête qu’il faut chercher pour fonder la morale mais dans le cœur, là où il est impossible de faire des calculs dans ses actes. C’est pour cela que Blaise Pascal affirme que le cœur a ses raisons que la raison ignore. Schopenhauer pense que toute action bonne est sincère et que le cœur devance toute forme intellectuelle pour parler de la morale : « L’homme se trouve dans le cœur, non dans la tête »[12]. Le cœur voit mieux la souffrance d’autrui que la raison. Sans cœur, l’homme est incapable de se mettre à la place de l’autre pour ensuite le secourir. Ce sentiment qui pousse l’homme à prendre part à la souffrance d’autrui rapproche Schopenhauer du christianisme qu’il admire sous ses formes les plus extrêmes, les plus ascétiques. A son plus haut niveau, la douleur a le don de nous chambouler et de nous ramener à faire l’impensable comme l’héroïsme et le martyre.
2.2. L’ascétisme
L’ascétisme, la dernière étape du renoncement au vouloir-vivre, permet à l’homme de refuser tout engagement dans la matérialité de la vie. Il s’agit de la panacée de l’existence malheureuse. L’ascète nie complètement le désir et se guérit définitivement. L’ennui trouve son remède dans l’indifférence désintéressée du sage qui contemple le monde sans désir pour gouter la paix. L’ascète rompt avec la Volonté grâce à une connaissance parfaite de l’essence du monde. Il choisit la mortification pour vaincre le vouloir-vivre. La mortification passe par des sacrifices, comme le jeûne ou même le désir de la mort en vue de la purification de l’âme non seulement pour soi mais surtout pour ses semblables qui en tirent la sagesse. Pour Schopenhauer, ce vouloir-mourir tel que nous le voyons dans l’héroïsme et le martyre relève du vrai suicide. Contrairement au suicidaire ordinaire qui est poussé par la déception, l’ascète accepte la mort avec courage et joie pour que ses actes et ses comportements servent d’exemple. Ce néant s’inscrit ainsi dans l’ordre de l’optimisme. Le néant relève de l’altruisme extrême participant à la création d’une vie heureuse pour autrui. Une vision positive dans une communauté s’acquiert par les efforts que chacun déploie pour arriver aux deux dernières solutions de la souffrance universelle : la compassion et l’ascétisme. Pour parvenir à une existence heureuse, la clef se trouve dans le rejet du désir de vivre et l’adoption du désir d’aider et de partager le malheur de l’autre. Le pessimisme nous apprend à vivre avec le minimum de plaisir pour vivre avec le minimum d’égoïsme. Il considère la souffrance comme positive et le bonheur comme négatif en vue de la négation de toute forme d’impulsion qui pervertit nos comportements :
« Le calme, le contentement et le bonheur sont en opposition directe avec la nature humaine ».[13]
Une telle disposition nous permet de réduire nos peines et d’augmenter la possibilité de jouir. Le bonheur du méchant est forcément éphémère tandis que le malheur du juste est temporaire.
Le pessimisme et la médiocrité
Il est évident que tout le monde veut être heureux. Et pour y parvenir, on associe « bonheur » et « optimisme », ce qui est assez naturel. Mais dans cette optique, seuls les méchants sont heureux. Ce qui revient aux avantages à cultiver le pessimisme. Les pessimistes vivent mieux que les optimistes d’autant plus qu’ils prennent en considération la présence de l’autre et qu’ils cultivent la prudence et la prévoyance vis-à-vis des tendances nuisibles menées par la science et la mondialisation. Sans prudence, ces deux dernières nous conduisent droit à la médiocrité comme nouvelle excellence. La plupart des gens sont bien heureux de leurs propres biens et de leur ignorance. Ils ferment les yeux devant la misère ; ils détournent le regard pendant que les autres crient « au secours ». Avec l’optimisme vulgaire, l’homme est tombé si bas qu’il vit dans un environnement où personne ne voit rien et ignore tout. Aujourd’hui, l’ignorance devient la nouvelle norme, la nouvelle excellence. Si, comme le pense d’ailleurs Schopenhauer, ce monde est un véritable enfer, c’est parce que la plupart des gens le veulent d’une manière ou d’une autre. Le philosophe allemand a bien raison de fonder la morale dans le cœur. En effet, si on ôte l’amour de n’importe quelle situation, de n’importe quel endroit et de n’importe quelle action, le résultat ne sera que douleur et peine de tous côtés. Il faut donc ramener l’amour du prochain dans tous nos actes.
Le pessimisme nous aide à nous éloigner du principe d’individuation et à vivre dans le véritable amour. C’est ainsi que nous parlons du pouvoir des pensées négatives. Ce pouvoir réside dans la disposition des uns à comprendre les autres dans la souffrance pour ensuite les aider. En pensant à ce qui pourrait mal se passer, voire au pire quand on laisse l’autre dans sa misère, on agirait mieux pour son propre compte. Il est plus facile pour les personnes pessimistes que pour les optimistes impénitents de sauver l’autre dans sa détresse. L’optimisme démesuré nous mène à se voiler la face et à ignorer que les autres vivent et souffrent comme nous ; ce qui bloque la voie vers l’altruisme. Le pessimisme permet d’accepter les évènements négatifs et d’en tirer des enseignements.
Dans ce monde, chacun veut vivre et beaucoup préfèrent vivre dans l’aisance. Pour y parvenir, on se heurte à la bousculade. Ce qui explique pourquoi les riches deviennent de plus en plus riches et les pauvres, bousculés par les riches, de plus en plus pauvres. Si la misère et la pénurie persistent, c’est parce que certains prennent beaucoup plus que ce qu’ils devraient. Si chacun ne prend que sa part et rien que ce qu’il doit prendre, il sera possible de réduire l’injustice et la misère. L’excès de l’affirmation du vouloir-vivre constitue un obstacle pour la vie heureuse, car dire excès c’est dire violation de domaine où l’autre affirme son vouloir-vivre.
Le pessimisme et l’optimisme
On croit depuis longtemps que la pensée positive est un moyen de réussite, de santé et de bonheur. Mais, le pessimisme est efficace pour établir la paix interne ou l’ataraxie et la paix externe à entendre par l’ordre social. Ce n’est pas une pensée négative car en tant que véritable garde-fou, il pousse notre cœur à inspirer la compassion ainsi que la vigilance par rapport à l’optimisme irrationnel. L’aspect négatif de la vie qu’avance le pessimisme nous porte à un tout autre niveau exploitant en réalité comme un moyen d’atteindre la tranquillité de l’âme résultant de la modération et de l’harmonie de l’existence. Le pessimisme est une stratégie utilisée pour nous aider à gérer la force du vouloir-vivre et à désobéir à une pulsion qui nuit à la relation sociale. Cela donne envie de travailler dans la direction opposée à l’objectif de la nature. Les pessimistes utilisent leurs attentes négatives pour les motiver à prendre des mesures efficaces et pour se sentir prêts et mieux contrôlés dans ce qu’ils pensent être bien collectivement. Être pessimiste est loin d’être une mauvaise chose parce que ce qui compte, c’est ce que l’humain récolte à la suite de ce pessimisme.
Contrairement à l’optimiste qui pense que « tout finira bien » dans sa manœuvre individualiste, le pessimiste pense que le réel est à travailler collectivement. Il est plus empathique. Il est capable de se mettre à la place d’autrui, de comprendre ses sentiments et ses émotions et d’écouter ses larmes. C’est ainsi que tout optimisme doit s’appuyer sur le pessimisme. Il est vrai que pour sortir de la torture de la volonté de vivre, de la souffrance et de l’ennui, nous avons besoin de suivre un chemin vers une vision positive. Mais étant donné que nous sommes condamnés à vouloir-vivre, à désirer la vie, cette voie doit prendre en compte une vision négative pour éviter toute violation de l’affirmation de la volonté étrangère. Ces deux postures (pessimisme et optimisme) sont donc nécessaires et complémentaires. Savoir que la vie nous réserve des vicissitudes, cela ne signifie pas qu’il faut être pessimiste en permanence et tout voir en négatif. Ce serait affreux. Mais plutôt qu’il faut rester vigilant tout en gardant comme moteur principal l’optimisme qui nous fait avancer dans la création d’une vie heureuse. Au fond, le pessimisme est un bon serviteur et un mauvais maître. L’équilibre entre les deux postures nous donne un homme qui accepte de voir le mal en face et d’y remédier. Penser au pire c’est déjà envisager une issue positive. Cela aiguise notre faculté de discernement. Sans pessimisme, l’optimisme cause plus de souffrance que le pessimisme même. La bonne façon d’être optimiste est de faire preuve de la compassion, de la pitié et de la sympathie.
Conclusion
Nous pouvons en conclure que le pessimisme schopenhauerien est un pessimisme constructif qui se confronte au conflit du vouloir-vivre et va plus loin dans une attitude philanthrope, source d’une véritable vie positive. C’est un outil efficace pour fonder un véritable optimisme. Schopenhauer est pessimiste pour ne pas l’être. Son pessimisme nous amène à la délivrance par rapport à cette existence dans son état de conflit et de malheur. La seule délivrance passe par la négation ou au moins la réduction du vouloir-vivre. Le pessimisme nous aide à mieux comprendre combien même la vie n’est que souffrance et ennui non pas pour le simple plaisir de présenter le mauvais côté du monde mais pour que nous soyons capables de nier la vie dans le seul but de secourir les autres et par là créer un monde meilleur, là où nous atteindrons un plus faible degré de la souffrance.
[1] RASAMOEL Paul Fried de Valois est un enseignant vacataire à l’Université de Mahajanga. Il enseigne la philosophie à l’Institut des Langues et Civilisations(ILC). Il a fait ses études philosophiques à l’Université Catholique de Madagascar (UCM). Après avoir eu son diplôme de Master, il s’est inscrit dans une école doctorale à l’Université de Tamatave où il est actuellement doctorant.
[2] La Volonté avec un « V » majuscule désigne la volonté de la nature ou de l’espèce. Elle conçue comme idée. Par contre, la volonté avec un petit « v » signifie Volonté telle qu’elle se manifeste chez l’individu en tant qu’échantillon d’espèce.
[3] Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, traduit en Français par Auguste Burdeau, Paris Librairie Felix Alcan, 108 Boulevard Saint Germain 108, 1912, numérisé par Guy Heff, 2013, p.750.
[4] Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, Tome 1, traduction d’A. Burdeau, éd. 7, Librairie Félix Alcan, Paris, p.326.
[5] Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, traduit en Français par Auguste Burdeau, Paris Librairie Felix Alcan, 108 Boulevard Saint Germain 108, 1912, numérisé par Guy Heff, 2013, p.1900.
[6]Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, Tome 1, traduction d’A. Burdeau, éd. 7, Librairie Félix Alcan, Paris, p.380.
[7] Ibid., p.744.
[8]Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, Tome 1, traduction d’A. Burdeau, éd. 7, Librairie Félix Alcan, Paris, p.417.
[9]Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, traduit en Français par Auguste Burdeau, Paris Librairie Felix Alcan, 108 Boulevard Saint Germain 108, 1912, numérisé par Guy Heff, 2013, p. 2001.
[10]Cf. Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, traduit en Français par Auguste Burdeau, Paris Librairie Felix Alcan, 108 Boulevard Saint Germain 108, 1912, numérisé par Guy Heff, p.845.
[11] Arthur SCHOPENHAUER, Le vouloir-vivre et la sagesse, éd. PUF, Paris, p.197.
[12]Idem.
[13]Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté et comme Représentation, traduit en Français par Auguste Burdeau, Paris Librairie Felix Alcan, 108 Boulevard Saint Germain 108, 1912, numérisé par Guy Heff, 2013, p. 240.