Citations de Marcel Proust

Marcel Proust

Quelques citations de Marcel Proust

Ne pas citer Proust, en philosophie, est une erreur. C’est assez peu connu, mais La recherche du Temps perdu est au centre de la philosophie moderne. Penseur de la subjectivité et de l’amour, et de la jalousie en particulier, Proust nous fait comprendre les ressorts du cœur, les affres de l’amour et les tribulations du moi. Penseur de la mémoire également (célèbre théorie de la conscience affective, matérialisée grâce à la madeleine), Proust décrit une subjectivité marquée par la confusion et le chaos internes, irrémédiablement seule face à ses angoisses, définitivement condamnée au malheur.

Voici quelques citations de Proust pour se convaincre de l’importance de cet auteur en philosophie.

Proust, la subjectivité et autrui :

– “Les liens entre un être et nous n’existent que dans notre pensée. La mémoire en s’affaiblissant les relâche, et, malgré l’illusion dont nous voudrions être dupes et dont, par amour, par amitié, par politesse, par respect humain, par devoir, nous dupons les autres, nous existons seuls. L’homme est l’être qui ne peut sortir de soi, qui ne connaît les autres qu’en soi, et, en disant le contraire, ment”

Proust et l’amour :

– “Sans doute peu de personnes comprennent le caractère purement subjectif du phénomène qu’est l’amour, et la sorte de création que c’est d’une personne supplémentaire, distincte de celle qui porte le même nom dans le monde, et dont la plupart des éléments sont tirés de nous-mêmes”

– “Chaque être est détruit quand nous cessons de le voir; puis son apparition suivante est une création nouvelle, différente de celle qui l’a immédiatement précédée, sinon de toutes”

– “L’amour devient immense, nous ne songeons pas combien la femme réelle y tient peu de place”

– “Ce qu’on prend en présence de l’être aimé n’est qu’un cliché négatif, on le développe plus tard, une fois chez soi, quand on a retrouvé à sa disposition cette chambre noire intérieure dont l’entrée est condamnée tant qu’on voit du monde”

– “L’expérience aurait dû m’apprendre – si elle apprenait jamais rien – qu’aimer est un mauvais sort comme ceux qu’il y a dans les contes, contre quoi on ne peut rien jusqu’à ce que l’enchantement ait cessé

Citations de Proust sur la jalousie :

– “Cette angoisse qu’il y a à sentir l’être qu’on aime dans un lieu de plaisir où l’on n’est pas, où l’on ne peut pas le rejoindre, c’est l’amour qui la lui a fait connaître, l’amour, auquel elle est en quelque sorte prédestinée, par lequel elle sera accaparée, spécialisée; mais quand, comme pour moi, elle est entrée en nous avant qu’il ait encore fait son apparition dans notre vie, elle flotte en l’attendant, vague et libre, sans affectation déterminée, au service un jour d’un sentiment, le lendemain d’un autre, tantôt de la tendresse filiale ou de l’amitié pour un camarade”

– “Autrefois on rêvait de posséder le cœur de la femme dont on était amoureux; plus tard, sentir qu’on possède le cœur d’une femme peut suffire à vous en rendre amoureux”

– “Avec l’amour avait disparu le désir de montrer qu’il n’avait plus d’amour”

– “le bonheur ne peut jamais avoir lieu. Si les circonstances arrivent à être surmontées, la nature transporte la lutte du dehors au dedans et fait peu à peu changer assez notre cœur pour qu’il désire autre chose que ce qu’il va posséder. Et si la péripétie a été si rapide que notre cœur n’a pas eu le temps de changer, la nature ne désespère pas pour cela de nous vaincre, d’une manière plus tardive il est vrai, plus subtile, mais aussi efficace. C’est alors à la dernière seconde que la possession du bonheur nous est enlevée, ou plutôt c’est cette possession même que par ruse diabolique la nature charge de détruire le bonheur. Ayant échoué dans tout ce qui était du domaine des faits et de la vie, c’est une impossibilité dernière, l’impossibilité psychologique du bonheur, que la nature crée. Le phénomène du bonheur ne se produit pas ou donne lieu aux réactions les plus amères”

– “Albertine n’était, comme une pierre autour de laquelle il a neigé, que le centre générateur d’une immense construction qui passait par le plan de mon cœur”

– “Il vaut mieux ne pas savoir, penser le moins possible, ne pas fournir à la jalousie le moindre détail concret”

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Proust et l’habitude :

– “L’influence anesthésique de l’habitude ayant cessé, je me mettais à penser, à sentir, choses si tristes”

Proust, la madeleine et la mémoire :

– “Quand d’un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l’odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l’édifice immense du souvenir”

– “Le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant”

Proust et le bonheur :

– “On ne connaît pas son bonheur. On n’est jamais aussi malheureux qu’on croit”

– “Car le bonheur seul est salutaire pour le corps, mais c’est le chagrin qui développe les forces de l’esprit”

– “Quant au bonheur, il n’a presque qu’une seule utilité, rendre le malheur possible”

Proust, la douleur et la souffrance :

– “La douleur est un aussi puissant modificateur de la réalité qu’est l’ivresse”

– “La force qui fait le plus de fois le tour de la terre en une seconde, ce n’est pas l’électricité, c’est la douleur”

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6 Comments

  1. says: citations de proust

    ma citation préférée de proust est : Quant au bonheur, il n’a presque qu’une seule utilité, rendre le malheur possible

  2. says: jasmine

    Moi aussi, parmi mes préférées du moins ! Je la comprends comme faisant référence à la perte de ce qui a pu nous rendre heureux et à l’idée selon laquelle on se rend malheureux à vouloir atteindre un idéal hors de portée… Et vous ?!

  3. says: philocours

    Oui, c’est le sens dans lequel on peut entendre ce mot de Proust.
    Proust était très partagé entre deux visions du bonheur : un paradis perdu et une illusion qui fait vivre.
    Il y a avait, comme vous le remarquez, quelque chose de très stoïcien chez Proust dans conception du bonheur.
    Comme disaient les monty python, c’est quand on attend rien qu’on est jamais déçu …

  4. says: le temps retrouvé

    mon préféré est le début d’Albertine Disparue :
    “Mademoiselle Albertine est partie ! Comme la souffrance va plus loin en psychologie que la psychologie ! Il y a un instant, en train de m’analyser, j’avais cru que cette séparation sans s’être revus était justement ce que je désirais, et comparant la médiocrité des plaisirs que me donnait Albertine à la richesse des désirs qu’elle me privait de réaliser, je m’étais trouvé subtil, j’avais conclu que je ne voulais plus la voir, que je ne l’aimais plus. Mais ces mots : « Mademoiselle Albertine est partie » venaient de produire dans mon cœur une souffrance telle que je ne pourrais pas y résister plus longtemps. Ainsi ce que j’avais cru n’être rien pour moi, c’était tout simplement toute ma vie. Comme on s’ignore !”

    la perfection de la langue française …

  5. Ping : Proust : La recherche du Temps Perdu (résumé)
  6. says: Cédric

    Illustrer un article consacré à Proust par le portrait de Montesquiou peint par Boldoni est tout de même un comble !

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